La grève et ses implications sur la relation de travail
14 novembre 2025
La grève fait partie intégrante du paysage social belge. Elle est reconnue comme un droit fondamental permettant aux travailleurs d’exprimer leurs revendications collectives. Toutefois, son exercice n’est pas sans conséquence sur la relation de travail, en particulier sur la question de la rémunération. Faisons le point sur les différents cas de figure possibles.
Un droit encadré
L’employeur ne peut pas interdire à un travailleur de participer à une journée d’action syndicale. Chaque salarié reste libre de se joindre ou non à un mouvement de grève.
Une exception existe toutefois : certains secteurs imposent la mise en place d’un service minimum. Dans ce cas, les travailleurs désignés pour assurer cette continuité de service ne peuvent pas participer à la grève. Ils poursuivent leurs prestations habituelles et perçoivent donc leur salaire normal.
1. Le travailleur qui participe à la manifestation
Lorsqu’un collaborateur décide de rejoindre la manifestation ou de faire grève, son contrat de travail est suspendu pour la journée concernée.
Concrètement, cela signifie qu’il ne perçoit pas de rémunération pour cette période d’absence.
S’il est affilié à une organisation syndicale, il peut toutefois s’adresser à celle-ci afin d’obtenir une indemnité de grève, destinée à compenser partiellement la perte de salaire.
2. Le travailleur non-gréviste qui ne peut pas travailler
Un autre scénario concerne le travailleur qui ne participe pas à la grève, mais se retrouve dans l’impossibilité d’exercer son activité.
Cela peut se produire, par exemple, si l’accès à l’entreprise est bloqué, ou si le télétravail n’est pas autorisé par l’employeur.
Dans ce cas, le principe est clair : aucun salaire n’est dû.
Toutefois, il peut être envisagé que le travailleur perçoive des allocations de chômage temporaire, sous réserve d’une double condition :
-
il ne fait pas partie de la même unité de travail que les grévistes ;
-
il n’a pas d’intérêt direct dans les revendications portées par ces derniers.
Si ces critères sont remplis, une demande peut être introduite auprès de l’ONEM pour obtenir cette forme d’indemnisation.
3. Le travailleur empêché de se rendre au travail à cause de la grève
Il arrive également qu’un collaborateur souhaite travailler mais ne puisse pas rejoindre son lieu de travail à temps.
Dans ce cas, le travailleur peut, sous certaines conditions, conserver son droit au salaire journalier garanti. Trois éléments doivent être réunis :
-
le travailleur est apte au travail et avait l’intention de se rendre normalement au travail ;
-
la cause du retard ou de l’absence s’est produite pendant le trajet ;
-
ces circonstances sont imprévisibles et indépendantes de sa volonté (par exemple un barrage routier non annoncé).
Le salarié doit pouvoir prouver qu’il a fait tout ce qui était raisonnablement possible pour se rendre sur son lieu de travail. S’il démontre ses efforts, l’employeur doit maintenir le paiement du salaire.
Le cas particulier des grèves annoncées
Lorsqu’une grève est annoncée à l’avance — par exemple dans les transports en commun —, la situation change.
Étant donné que l’événement est prévisible et connu à l’avance, le travailleur ne peut plus invoquer la circonstance imprévisible. Dans ce cas, le contrat de travail est suspendu pour cause de force majeure et aucun salaire n’est dû.
L’employeur peut cependant encourager ses collaborateurs à anticiper : covoiturage, transport privé, organisation du travail adaptée, etc.
Mais si le salarié prouve qu’il lui était réellement impossible de se rendre au travail (par exemple, impossibilité d’utiliser son véhicule ou d’être pris en charge par un collègue), il garde son droit à la rémunération.
Cette notion d’impossibilité doit être interprétée avec bon sens : l’employeur ne peut pas exiger un effort démesuré de la part de son travailleur, comme marcher plusieurs kilomètres ou engager des frais de transport disproportionnés, sauf s’il accepte de les rembourser.
L’interdiction de recourir à des intérimaires
Un point souvent méconnu : il est strictement interdit de remplacer des travailleurs grévistes par du personnel intérimaire ou sous contrat de remplacement.
Cette interdiction s’applique aussi aux intérimaires déjà présents dans l’entreprise avant le début de la grève.
Autrement dit, même un intérimaire engagé antérieurement ne peut être utilisé pour contourner les effets du mouvement social.
Cette règle vise à protéger le droit de grève et à éviter toute forme de pression ou de substitution du personnel régulier.
En résumé
-
Le droit de grève est reconnu en Belgique : un employeur ne peut s’y opposer.
-
Les travailleurs grévistes ne sont pas rémunérés, mais peuvent percevoir une indemnité syndicale.
-
Les non-grévistes empêchés de travailler n’ont pas droit à leur salaire, sauf s’ils remplissent les conditions pour obtenir une allocation de chômage temporaire.
-
Les travailleurs bloqués en chemin conservent leur salaire uniquement si les circonstances sont imprévisibles et indépendantes de leur volonté.
-
En cas de grève annoncée, l’absence est considérée comme prévisible : le salaire n’est donc pas dû.
-
Enfin, il est interdit de recourir à des intérimaires ou remplaçants pendant une grève.
En conclusion
Chaque mouvement social entraîne son lot de questions pratiques.
Pour les employeurs, il s’agit de respecter les droits de chacun tout en assurant, dans la mesure du possible, la continuité de l’activité.
Pour les travailleurs, connaître les règles applicables leur permet d’exercer leurs droits en toute transparence.
👉 Vous avez un doute sur une situation concrète ? N’hésitez pas à nous contacter !
Nos experts sont à votre disposition pour vous accompagner dans la gestion des absences et la compréhension des impacts salariaux d’une grève.
Articles récents
Restez informés en suivant nos actualités.
Envie de recevoir nos actualités dans votre boite mail ?